Reflets Mag #144 | Karine Julien-Elkaïm (M98) : « Le logement social doit devenir une grande cause nationale »
Dans Reflets Mag #144, Karine Julien-Elkaïm (M98), présidente du comité exécutif du Groupe Polylogis, alerte sur les graves perturbations qui menacent le modèle économique des logements sociaux en France. On vous met l’article en accès libre… abonnez-vous pour lire les prochains numéros !
Reflets Magazine : Pouvez-vous nous présenter le modèle économique des logements sociaux en France ?
Karine Julien-Elkaïm : Le secteur s'est bâti sur les aides à la pierre, qui permettaient de diminuer les loyers, et sur les aides à la personne, qui solvabilisaient les locataires. Mais cet équilibre est mis à mal par la réduction drastique des aides à la pierre et par la réforme des APL, malgré des facilités financières consenties par la Caisse des Dépôts et par Action Logement. Les opérateurs doivent chercher de nouvelles ressources, comme la vente aux occupants.
RM : Dans ce contexte, quel est l’état du marché des logements sociaux en France ?
K. Julien-Elkaïm : 5,6 millions de logements accueillent 11 millions de personnes, soit 17,6 % de la population française. Cependant la programmation est en baisse constante depuis 2017, sous l’effet de la hausse des prélèvements, de la crise sanitaire, de la pénurie de foncier et du contexte électoral. Seuls 65 000 logements sociaux ont été mis en location entre 2020 et 2021, contre un objectif officiel de plus de 100 000.
RM : Quelles solutions à cette situation ?
K. Julien-Elkaïm : Primo, la construction : l’État doit refaire du logement social une grande cause nationale, en favorisant l’accès au foncier. Deuxio, la diversification : du logement très social au logement abordable, des résidences spécialisées aux foyers pour personnes fragiles, il faut développer de nouvelles solutions adaptées à tous les publics.
RM : Le secteur des logements sociaux répond-il aux mêmes dynamiques sur l’ensemble du territoire ?
K. Julien-Elkaïm : Non – ce qui rend difficile l’élaboration d’une politique nationale et oblige à déléguer des compétences aux collectivités locales. Les logements manquent surtout dans les zones urbaines qualifiées de « tendues » où les loyers privés peuvent être jusqu'à 4 fois plus élevés. En Île-de-France, 700 000 demandes attendent d’être traitées…
RM : Les logements sociaux souffrent parfois d’une mauvaise image. Cette image correspond-elle à la réalité ?
K. Julien-Elkaïm : D’importants investissements ont été réalisés depuis 20 ans, notamment dans le cadre des opérations de renouvellement urbain de l’ANRU. Le secteur réhabilite plus de 100 000 logements par an et 85 % des locataires se disent satisfaits aujourd’hui.
RM : Quid de l’enjeu environnemental ?
K. Julien-Elkaïm : Nous sommes mobilisés comme l’ensemble des acteurs immobiliers. Le Groupe Polylogis a engagé un plan de travaux de rénovation énergétique, une démarche de réduction de la consommation d’énergie et un plan de sortie progressif des énergies carbonées. Sans oublier le recours croissant à des isolants et matériaux bas carbone ou encore l’essor des énergies thermiques renouvelables dans notre parc existant.
Propos recueillis par Louis Armengaud Wurmser (E10), responsable des contenus ESSEC Alumni
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