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Karine Lévy-Heidmann (E11), organisatrice de la Cancer Pride : « Ensemble, faisons reculer la maladie »

Interviews

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07.19.2018

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Karine Lévy-Heidmann (E11) organise la première édition de la Cancer Pride le 13 avril 2019 à Paris. Objectif : sensibiliser les jeunes adultes à cette maladie qui les concerne plus qu’ils ne croient… 

ESSEC Alumni : Comment en êtes-vous venue à lancer le projet Cancer Pride ?

Karine Lévy-Heidmann : En 2015, ma meilleure amie Fleur-Anne est décédée d’un cancer du colon. Cela paraît complètement aberrant, à 27 ans, de voir sa meilleure amie mourir d’une maladie « de vieux ». Et pourtant, en m’intéressant à des initiatives contre le cancer portées par d'anciens patients, je me suis rendue compte qu'elle était loin d’être la seule. Aujourd’hui, nous, les jeunes adultes, faisons face à des risques qui s’accumulent dangereusement par rapport aux générations de nos parents (pesticides, plastiques, perturbateurs endocriniens…). Mais comme nous sommes trop jeunes pour les campagnes de dépistage et trop vieux pour continuer à aller chez le pédiatre, nous passons entre les mailles du filet. J'ai donc décidé de lancer un mouvement de citoyens et d’entrepreneurs pour agir ensemble, dans le cadre de l’association makesense dont je fais partie depuis plusieurs années. Ce petit groupe, né fin 2016, est devenu une mobilisation de plusieurs centaines de personnes : Kicking Cancer. Et 1 an après notre création, nous avons décidé de frapper plus largement en montant un événement qui rassemblera tout le monde, pour vraiment mettre le cancer sur le devant de la scène : la Cancer Pride.

EA : La Cancer Pride aura lieu le 13 avril à Paris. Quel est le programme de l'événement ? 

K. Lévy-Heidmann : Nous commencerons par une grande parade dans les rues, de 13h à 14h, avec des banderoles, de la musique et de la danse, et surtout un maximum de personnes. La marche doit être accessible à tous, malades et non malades, donc elle sera volontairement lente et courte. Mais aussi engagée et festive.
Puis de 14h à 20h, nous animerons un village de 18 stands sur la Place de la République, avec l'aide de plus de 60 partenaires (associations, institutions, centres de recherche, hôpitaux, entrepreneurs, anciens patients porteurs de projets…). Par exemple, un stand sur la recherche proposera aux passants de répondre à une étude sur les essais cliniques. Un autre stand proposera des activités bien-être pour faciliter le dialogue entre patients et aidants. D'autres présenteront et parfois testeront des solutions innovantes méconnues du grand public. Tous ces stands sont construits par deux, trois organisations ou plus ; c’est très important que de premières collaborations démarrent.

EA : Quels sont les objectifs de cette opération ?

K. Lévy-Heidmann : Les acteurs de la lutte contre le cancer sont nombreux et cette profusion tend à diluer leur impact. Ils réclament tous plus de collaboration, plus de lieux et d'opportunités de rencontre. La Cancer Pride, c'est un moyen de les connecter au sein d’un même mouvement !
Mais c'est aussi un événement grand public, le premier du genre. Nous voulons mettre les gens dans la rue pour libérer la parole une bonne fois pour toutes, que le cancer ne soit plus cette épidémie à moitié invisible, cette menace que tout le monde a en tête mais que beaucoup n'osent pas évoquer, car elle est souvent associée à des peurs intimes, à des drames personnels.

EA : Pourquoi vous paraît-il important de libérer la parole sur le cancer ?

K. Lévy-Heidmann : Parler, c'est le meilleur moyen que j'ai trouvé, après le décès de Fleur-Anne, pour transformer la tragédie en force. À chaque fois que j'ai raconté son histoire, il s'est passé deux choses : on m'a confié une histoire en échange, et on en est venus à parler de prévention. J'ai réalisé que personnaliser le sujet, c’était la seule solution pour parler sans angoisse du cancer et faire passer des messages lourds, notamment auprès des jeunes adultes, à qui les institutions n'ont pas encore trouvé comment s'adresser… Répéter « Arrêtez de fumer », ça ne fonctionne pas ; énumérer les facteurs de risque, c’est anxiogène. En revanche, dire « Ma meilleure amie a eu mal au ventre pendant des mois, donc toi aussi, écoute ton corps ! » ou bien « Oui, si tu as des grains de beauté, il faut aller chez le dermatologue régulièrement, et si ça fait 10 ans que tu n’y es pas allé, ce n'est pas normal, bouge toi » : ça, ça fonctionne.

EA : Quelles suites comptez-vous donner à la Cancer Pride, une fois le jour J passé ? 

K. Lévy-Heidmann : C'est une première édition, ce qui veut dire qu'il y aura une Cancer Pride 2020, si tout se passe bien. C'est en tout cas un souhait de nos partenaires, ainsi que d'autres organisations qui n'ont pas pu participer cette année et nous attendent l'année prochaine.
Mais cette Cancer Pride, c'est aussi un super tremplin pour Kicking Cancer, notre mobilisation plus globale autour du cancer et de sa prévention. Ces rencontres, ces partenariats sont des opportunités pour travailler, après l'événement, sur des projets concrets et de fond. Nous avons déjà quelques pistes dont nous discutons avec certains partenaires. Et nous souhaitons aussi accompagner les collaborations créées dans le cadre des stands pour les aider à aller plus loin. Il n'est pas question que ce travail commun s'arrête du jour au lendemain.

 

Propos recueillis par Louis Armengaud Wurmser(E10), responsable des contenus ESSEC Alumni

 

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