Reflets Mag #137 | Entreprises françaises : quelle stratégie face au COVID-19 ?
Comment les entreprises françaises font-elles face à la crise du COVID-19 ? Dans Reflets Mag #137, Jérôme Barthélemy (E93), directeur général adjoint du Groupe ESSEC, et Radu Vranceanu, professeur à l’ESSEC, partagent les résultats d’une étude qu’ils ont menée sur plus de 300 entreprises de toutes tailles et de tous secteurs. On vous met l’article en accès libre… abonnez-vous pour lire le reste du numéro !
La France a été touchée de plein fouet par le COVID-19. Le nombre de morts se rapproche de la barre des 100 000. En 2020, le produit intérieur brut (PIB) français a baissé de 9 %, la plus forte destruction de valeur depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. D’après la Banque de France, l’économie française ne devrait pas non plus retrouver son niveau d’activité de la fin 2019 avant début 2022. Comment les entreprises françaises réagissent-elles à cette récession sans précédent ?
Quatre stratégies possibles
La stratégie défensive consiste avant tout à réduire les coûts. À court terme, elle présente des avantages indéniables car elle permet de compenser la baisse de chiffre d’affaires. En revanche, elle permet rarement à une entreprise de « redémarrer » à l’issue de la récession.
La stratégie offensive met l’accent sur les investissements dans de nouveaux produits ou services. Elle se fonde sur l’intuition que les périodes de crise font émerger de nouvelles opportunités. Cette stratégie est nécessaire pour espérer sortir de la récession par le haut. En revanche, elle n’est pas à la portée de toutes les entreprises car elle nécessite des ressources financières non négligeables. Elle est également risquée car le succès n’est jamais garanti.
La stratégie duale combine les deux approches précédentes. Comme l’ont montré plusieurs études américaines, c’est la plus efficace pour sortir d’une récession plus fort qu’avant. La logique est très simple. La réduction des coûts permet de réduire les risques de faillite pendant la récession et les investissements permettent de pleinement bénéficier du redémarrage de l’économie à l’issue de la récession. Idéalement, ces deux approches doivent être utilisées de manière séquentielle. On commence par réduire les coûts avant d’investir. Enfin, la dernière stratégie consiste à ne rien changer et à attendre la fin de la tempête. Nous l’appelons stratégie du statu quo.
Quels choix en France ?
Pour évaluer l’impact du COVID-19 sur les stratégies des entreprises françaises, nous leur avons demandé comment leurs priorités ont évolué depuis le début de la crise. Les résultats indiquent que la réduction des coûts est devenue plus prioritaire pour la majorité des entreprises (61 %). Sans surprise, plus les entreprises ont été confrontées à une baisse de la demande et de leur chiffre d’affaires, plus elles ont été contraintes de réduire leurs coûts.
Certains secteurs d’activité ont également été plus touchés que d’autres. Plus étonnant, le développement de nouvelles offres est devenu plus prioritaire pour 67 % des entreprises. Les entreprises françaises semblent donc avoir été aussi proactives que réactives depuis le début de la crise due au COVID-19.
En croisant la mesure dans laquelle les entreprises françaises ont donné la priorité à la réduction des coûts et/ou au développement d’offres nouvelles depuis le début de la crise due au COVID-19, on obtient quatre profils types. La stratégie du statu quo est la moins courante (13 % des entreprises). On n’a pas non plus assisté à un raz de marée de la stratégie défensive. Seulement 20 % des entreprises ont opté pour cette stratégie, alors que 26 % des entreprises ont utilisé une stratégie offensive.
Au final, la stratégie duale est – de loin – la plus courante. Pour faire face à la crise due au COVID-19, 41 % des entreprises ont simultanément mis l’accent sur la réduction des coûts et le développement d’offres nouvelles.
Des résultats encourageants
Comme l’a montré la recherche en management, la stratégie duale est la plus efficace pour traverser une période de récession. Il est donc probable que l’impact de la crise due au COVID-19 sur les entreprises françaises sera moins dramatique qu’on le pense.
L’approche à la fois réaliste et constructive de nombreuses entreprises françaises est bien illustrée par les propos d’une dirigeante que nous avons sondée : « Pour nous, le COVID-19 a eu un impact d’abord très négatif avec une baisse immédiate de 40 % de notre chiffre d’affaires. Puis nous avons rationalisé les coûts. À partir de cette base, nous sommes repartis de plus belle et nous nous attendons maintenant à une croissance à deux chiffres. Finalement, le COVID-19 a été un tremplin pour nous. »
Le digital, planche de salut ?
Un autre enseignement de notre étude est que les entreprises françaises ont fait preuve d’une capacité d’adaptation remarquable dans le domaine du digital. Comme nous l’a confié un dirigeant : « Mon activité est totalement à l’arrêt depuis mars… mais j’ai profité de ces derniers mois pour repenser totalement l’offre en mettant notamment le turbo sur le digital qui était le maillon faible. »
Dans notre échantillon, 70 % des entreprises ont accru le déploiement d’outils digitaux pour interagir avec leurs clients. Cela a notamment permis aux entreprises qui ont mis en place des systèmes de commande et livraison en ligne de constater qu’elles peuvent toucher un public plus large à moindres frais.
Tous ces changements n’ont pas été possibles sans un accroissement des investissements dans le digital. Et c’est peut-être là que le bât blesse. Dans notre étude, 58 % des entreprises déclarent avoir augmenté leurs investissements dans les équipements informatiques et digitaux. En revanche, seules 46 % d’entre elles ont investi dans les compétences digitales de leur personnel. En croisant les deux réponses, on observe que 20 % des entreprises ont renforcé leurs investissements dans la composante matérielle du digital… mais pas dans la dimension humaine.
La rapidité avec laquelle la crise du COVID-19 s’est abattue sur les entreprises peut expliquer la priorité donnée à la composante matérielle. Mais il ne faudrait surtout pas oublier que la composante humaine est primordiale. Un bon commercial « en ligne » doit cumuler les qualités d’un commercial « de terrain » avec une parfaite maîtrise des outils digitaux. Cette transformation nécessite l’acquisition de nouvelles compétences dans le cadre d’un poste existant. Parfois appelée « upskilling », elle est nécessaire pour s’approprier les outils digitaux.
Extrait de Reflets Mag #137. Pour voir un preview, cliquer ici. Pour recevoir les prochains numéros de Reflets Mag, cliquer ici.
Commentaires0
Vous n'avez pas les droits pour lire ou ajouter un commentaire.
Articles suggérés