Mardis de l'ESSEC : Bernard Cazeneuve, ministre de l'Intérieur
Le 3 mai 2016, les Mardis de l’ESSEC ont reçu Bernard Cazeneuve, ministre de l’Intérieur, et l’ont mis en garde contre la tentation de préférer la sécurité à la liberté.
Déminage, fouilles, contrôles d’identité… La visite d’un ministre régalien en exercice est une affaire sérieuse. Celui-ci assume d’ailleurs une gravité qui « ne le quitte plus » depuis son entrée en fonction. De fait, il y a dans la tonalité et la teneur de ses propos une forme de constance rassurante. Non pas que son discours soit lisse ou monocorde. Il faudrait presque des sous-titres, tant chaque mot est pesé.
« Le fait de cultiver une parole rare ne signifie pas que l'on est misanthrope. (…) Ce que je ne souhaite pas, c'est d'avoir une parole inutile. » Interrogé sur le sens de sa présence à la tribune des Mardis, celui que sa majorité surnomme le cardinal indique en creux qu’il est las des responsables politiques trop bavards. « Quand on essaie de bien faire son travail, on n'a pas le temps d'essayer de montrer que l'on est indispensable. » Si Bernard Cazeneuve ne court pas les plateaux, il n’en souhaite pas moins faire état de la réalité de l’action de ses services, à son sens trop souvent caricaturée. Le ministre exècre les imprécisions de la presse autant que les « outrances » de l’opposition, qui l’accuse de faire preuve de laxisme, et de l’extrême-gauche, qui dénonce des violences policières.
Car depuis plusieurs mois, Bernard Cazeneuve est sur tous les fronts. L’après-midi même de sa venue à l’ESSEC, les députés de l’opposition le pressaient encore d’interdire les rassemblements de Nuit debout avant son audition au Sénat sur la prolongation de l’état d’urgence. Pourtant, en loge comme sur scène, le ministre reste posé, imperturbable, répondant avec calme et détermination à toutes les questions. Durant la première partie du débat consacrée à la crise migratoire, il déplore l’absence de réponse commune des États membres de l’Union. Face à la grandiloquence de certains « humanitaires en peau de lapin », il défend les mesures mises en place par le gouvernement, notamment à Calais, pour lutter contre les passeurs, contrôler les frontières, offrir un accueil humanitaire digne. Interrogé sur le faible nombre de demandes d’asile déposées en France, il s’en tire avec une explication géographique et élude le sujet de l’attractivité du pays.
Puis la discussion se recentre sur la lutte anti-terroriste. Concernant les risques inhérents à l’organisation de l’Euro 2016, les éléments de langage sont bien calés : « 100% de précaution mais pas de risque 0 ». D’ici là, le nouveau schéma d’intervention et les exercices menés en province auront encore permis d’améliorer l’efficacité du dispositif. Bernard Cazeneuve explique comment, après les attentats de janvier, il a réuni le GIGN et le RAID dans le célèbre fumoir pour les sommer de mettre fin à la guerre des polices. Il assure que ses exhortations ne resteront pas un vœu pieux. Interpellé par une étudiante chahutée dans les manifestations du 1er mai, il réaffirme enfin avec force qu’il sera intraitable en cas de manquement des forces de l’ordre, tout en rappelant que 18 000 policiers ont été blessés l’an dernier.
À la fin du débat, le ministre s’attarde au cocktail et prend plaisir à échanger avec les étudiants. Son chef de cabinet le presse de rejoindre le convoi qui l’attend. La journée n’est pas terminée. De retour à Beauvau, il passera sans doute une partie de sa Nuit debout.
Propos recueillis par Charles Tetu (étudiant).
Article paru dans le n°114 de Reflets ESSEC Magazine. Pour s'abonner, cliquer ici.
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