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Jeimila Donty (E17) : « Aidez-nous à sauver les coraux africains »

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Sustainable Business

Interviews

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16/11/2022

Jeimila Donty (E17) lance l'initiative Koraï pour sauvegarder les coraux, mangroves et herbiers marins de l'Afrique, menacés de disparition. Elle explique les causes de ce désastre et les solutions à mettre en œuvre. Vous avez jusqu’au 30 novembre pour contribuer à sa campagne de crowdfunding sur KissKissBankBank.

ESSEC Alumni : Comment votre parcours vous a-t-il menée à vous engager pour les coraux africains ?

Jeimila Donty : Née à Madagascar, j’allais plusieurs fois par an à Nosy Be, un archipel d’îles paradisiaques qui vous font tomber amoureux des plages et des coraux ! Mes parents ont en outre développé plusieurs entreprises sur place, dont des boutiques d’aquariums, un parc zoologique et une ferme de coraux. Au décès brutal de mon père en 2020, nous avons repris, avec mes trois frères, la ferme de coraux dont l’activité principale était la reproduction pour l’export. C’est ainsi que j’en suis venue à créer Koraï.

EA : Aujourd’hui, quelle est la situation des coraux africains ?

J. Donty : Selon Nature Sustainability, les 12 000 km2 de récifs coralliens qui longent les côtes africaines bordées par l’Océan Indien sont menacés de disparition totale d’ici 2070. C’est demain…

EA : La situation est-elle homogène tout au long des côtes africaines, ou varie-t-elle selon les zones ? 

J. Donty : Les récifs coralliens africains se trouvent principalement le long des côtes d’Afrique de l’Est, de la mer Rouge à l’Afrique du Sud en passant par le canal du Mozambique ; ils sont une ressource importante pour les pêcheurs de ces régions. D’autres récifs existent également dans la corne de l’Afrique. Les données manquent pour établir un tableau précis, mais logiquement, les situations paraissent varier selon le niveau d’activité d’une part, et le niveau d’intervention d’autre part. Les côtes les moins habitées ne semblent pas menacées pour le moment, et certains pays comme le Kenya et l’Afrique du Sud mènent déjà des projets de restauration efficaces. Cependant de nombreux autres pays – comme Madagascar – font face à de graves détériorations sans avoir les moyens de créer des programmes de protection.

EA : Quelles sont les causes de la disparition des coraux ?  

J. Donty : Dans le monde entier, les coraux font face à trois menaces majeures. Première menace : la destruction directe, liée aux pratiques de pêche, de tourisme et de construction non responsables comme la pêche à la dynamite, le lâcher d’ancre, le dragage de sable… Deuxième menace : la pollution des eaux (déversement d’eaux usées, microplastiques…) qui modifie la salinité des mers. Troisième menace, la plus importante : le réchauffement climatique. On estime qu’une hausse de la température terrestre de 1,5°C conduirait à la disparition de 70 % des coraux.

EA : À ce jour, quels acteurs se mobilisent-ils pour améliorer la situation ? 

J. Donty : On distingue trois types d’acteurs : les institutions, les associations et les entreprises. L’International Coral Reef Initiative (ICRI), qui compte la France parmi ses pays fondateurs, constitue l’une des organisations les plus importantes dans ce domaine : elle finance des initiatives allant de la recherche à la restauration en milieu naturel. Le monde associatif est également très actif, de façon ultra locale ou parfois internationale, comme Coral Guardian qui effectue un précieux travail de formation et d’autonomisation des populations situées dans leurs zones d’intervention. Enfin, quelques entreprises s’engagent, comme Coral Gardeners en Polynésie Française ou Coral Vita aux États-Unis. Mais il n’y en a pas encore en Afrique à ma connaissance – d’où l’idée de créer Koraï.

EA : Quelles solutions ces différents acteurs proposent-ils ? 

J. Donty : Certains capitalisent sur le B2C et la sensibilisation, et proposent par exemple d’adopter un corail. On reçoit alors un certificat d’adoption et des informations sur l’espèce qu’on a contribué à préserver. D’autres se concentrent plutôt sur le B2B et aident par exemple les entreprise à élaborer un plan RSE sur mesure pour financer des programmes de restauration. Ils font en outre avancer la recherche, notamment sur l’évolution assistée, qui consiste à aider les coraux à supporter la hausse inévitable de la température sur Terre.

EA : Selon vous, ces solutions peuvent-elles suffire ? 

J. Donty : Tous les acteurs du secteur travaillent à mesurer l’impact de leurs actions dans la durée et certains publient déjà des rapports d’évolution – mais la donnée reste encore insuffisante et difficile à analyser. C’est pourquoi j’ai décidé de lancer un défi dans le cadre du prochain Ocean Hackaton de Nausicaa : créer un outil d'aide à la décision qui permette de mieux cibler les zones endommagées à recoloniser (repérables au blanchiment de coraux et au dégarnissage des herbiers marins) et d’assurer un meilleur suivi scientifique des projets de restauration.

EA : Vous-même, vous développez vos propres solutions avec Koraï. Pouvez-vous présenter vos activités ? 

J. Donty : Nous restaurons mangroves, herbiers marins et coraux à travers l'Afrique grâce à un réseau de nurseries standardisées, autour duquel nous proposons trois produits. Primo, un plan RSE sur-mesure pour les sociétés souhaitant participer au retour de la biodiversité dans la zone – transporteurs maritimes, grandes chaînes hôtelières… Deuxio, un dispositif de compensation carbone via nos plantations. Tertio, des visites ludo-éducatives de nos nurseries comme on peut en faire dans un musée d’histoire naturelle ou un aquarium.

EA : Quelles actions avez-vous déjà menées ? 

J. Donty : Nous avons d’abord testé une première plantation de coraux avec mes frères. Ces derniers ont aussi initié une expérience de restauration autour de l’île d’Antsoha, aire marine protégée (AMP) gérée par Lémuria Land – avec succès : la vie a repris à vue d'œil !

EA : Quelles sont vos prochaines étapes de développement ?

J. Donty : Tout d’abord, finaliser la conversion de la nurserie malgache qui sert de pilote au projet Koraï. Nous l’avons réhabilitée, il reste à peaufiner la partie muséale, pour une inauguration prévue à la fin de l’année. Ensuite, j’aimerais recruter trois postes clés : un ou une COO, un ou une Chief R&D Officer provenant du milieu de la biologie marine et un ou une stagiaire qui s’occupera de rendre pleinement opérationnelle la nurserie de Nosy-be. N’hésitez pas à me contacter.

EA : Comment les ESSEC peuvent-ils soutenir vos activités – et plus largement la mobilisation pour les coraux africains ?

J. Donty : Tout d’abord, je vous encourage à vous informer sur la question. Je vous conseille notamment le documentaire Chasing Corals sur Netflix, ainsi que le livre ludique Corails de l’Institut Océanographique de Monaco. Ensuite, j’invite celles et ceux qui pourraient être intéressés par un partenariat – dirigeants RSE d’ETI souhaitant s’engager pour la biodiversité marine, organisateurs d’éco-tourisme – à entrer en relation avec moi. Enfin, je mène actuellement une campagne de crowdfunding sur KissKissBankBank pour compléter mon capital de départ, ce qui me permettra de finaliser mon produit minimum viable et d’aller chercher des financements supplémentaires par effet de levier. Vous avez jusqu’au 30 novembre pour participer !

 

Vous avez jusqu’au 30 novembre pour participer à la campagne de crowdfunding de Koraï sur KissKissBankBank.

En savoir plus : 
korai-africa.com

Propos recueillis par Louis Armengaud Wurmser (E10), responsable des contenus ESSEC Alumni

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