En attendant votre prochain entretien individuel avec ses coachs, le Service Carrière d’ESSEC Alumni vous donne ses conseils pour évoluer dans le marché du travail. Aujourd’hui, Roxandra Sturdza (E12) prévient : il n’y a pas d’âge pour faire un burn-out. Au contraire, les moins expérimentés sont parfois les plus fragiles.
À 22 ans, Anne fait un premier burn-out, son travail consiste à lire des rapports annuels et à les entrer dans un logiciel. Au deuxième, elle a 27 ans, et oscille entre suractivité et inactivité en conseil. Avant le troisième prévu pour ses 30 ans, face à un patron odieux et une reconnaissance inexistante, elle se dit : cette fois on arrête. Tel un déserteur d'une guerre qui n'était plus la sienne, elle part, et fuit cette recherche inassouvie de rentabilité…
Des jeunes dans l'étau du surmenage et de la dépersonnalisation
En France, le burn-out touche 13 % de la population active (selon le cabinet Technologia) et les jeunes font aussi partie du lot. Même si, pour la plupart, ils sont plus silencieux. Certains, comme Zoé, n’iront pas consulter et négocieront la fameuse rupture conventionnelle sans expliquer un départ. « J’ai dit que je voulais monter ma boîte, c’est passé comme sur des roulettes. En fait, j’étais en burn-out. » Le burn-out se définit par trois axes : un épuisement professionnel, une dépersonnalisation et une perte d’accomplissement personnel. Un jeune sur douze seulement déclare ce symptôme au médecin du travail alors que le stress, immense facteur du burn-out, est reconnu comme premier problème de santé au travail en 2017.
Des pathologies physiques aux douleurs psychologiques
Si les années soixante-dix ont marqué la fin d’un travail physiquement contraignant, la difficulté est devenue mentale. L’entrée des mathématiques en finance et le développement du marché des actions ont accéléré les exigences de rentabilité. Les bases de données, l’Internet et le portable ont créé de nouvelles contraintes. Face à celles-ci, le burn-out se développe. Il touche les personnes les plus impliquées dans leur travail. Pour Geri Puleo, psychiatre, « les burn-out sont les canaris qui détectent les gaz toxiques dans les mines. Si vous avez des employés en burn-out, pensez-y. Ils signalent un danger ».
L'épanouissement comme remède
Les burn-out indiquent un fossé entre le souhait de la direction et la capacité de l’employé : l’absurdité entre une entreprise exigeante et protocolaire et sa promesse d’épanouissement personnel. « Le travail du cadre change », nous dit le burn-out. Le reporting s’amplifie, les tâches sont plus morcelées et la durée du travail devient extensible. L’entretien annuel individuel est devenu systématique. L’homme est apparenté à une machine : on calcule sa rentabilité, son taux de défaillance et son mode d’emploi. Le burn-out dénonce également le constat suivant : si les nouvelles technologies ont été source d’un immense progrès, leur mode d’emploi n’a pas suivi. Les bases de données sont gigantesques et vertigineuses. Téléphone et mails facilitent la transmission d’une pression souvent démesurée et accélèrent tout changement. L’homme s’est retrouvé sous la domination des technologies.
Quelques pistes pour s'en sortir
Il appartient pourtant à chacun de faciliter les conditions de travail comme nos aïeux ont diminué la fatigue physique.
Une première solution est de sortir d’une logique financière à court terme et de viser le moyen terme : développer le réalisme, prioriser et planifier le travail. En finir avec l’ère de l’instantané et le changement permanent. « Former le manager à l’humain » nous conseille, sur un autre plan, le psychiatre M. Legeron, et comprendre que cette considération de la dimension humaine peut être source de profit. Le stress coûte cher – presque 600 milliards annuels – à l’Union européenne. Créer une notion d’équipe et des espaces d’échanges s’avère un investissement rentable. Autoriser l’homme à lâcher prise le rend, à long terme, plus performant. On peut enfin se permettre de philosopher : chacun est unique et a une place à trouver dans l’entreprise, ne nous réduisons pas à notre rentabilité financière. Trouver un sens à son travail est pour chacun essentiel : un ouvrier mettant des pierres l’une sur l’autre sera moins heureux que celui qui sait qu’il construit une cathédrale.
À nous alors de construire avec bon sens et bienveillance de nouvelles cathédrales.
Propos recueillis par Solveig Debray Sandelin
Illustration : © katemangostar / Freepik
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