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Matthieu David-Experton (E08), multientrepreneur : « Se lancer en Chine, c’est se lancer une seconde fois »

Interviews

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08.13.2018

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Matthieu David-Experton (E08) a créé plusieurs entreprises en Chine. Voici ses conseils à ceux qui voudraient suivre son exemple. 

EA : Vous avez lancé votre première start-up en Chine dès votre sortie de l’ESSEC, en 2008. Pourquoi avoir fait ce choix ? 

Matthieu David-Experton : La grande crise de 2008 venait d’éclater, et les entreprises françaises se tournaient massivement vers ce qui représentait alors le seul relais de croissance existant, à savoir la Chine. Les bureaux chinois de Business France (connu alors sous le nom d’Ubifrance) enregistraient l’une de leurs meilleures années en nombre de missions, alors que l’Ouest était en récession.

EA : La Chine s’est-elle avérée l’Eldorado espéré ?

M. David-Experton : Nombre de PME françaises exploratrices du marché chinois ont compris que « le monde n’était pas plat », et que les aspérités culturelles, sociales, administratives, et structurelles étaient bien réelles. Pour beaucoup d’entre elles, se lancer sur le marché chinois est revenu à se lancer une deuxième fois. Pourtant, depuis l’ouverture de la Chine au début des années 80, l’expérience avait déjà largement montré que les produits étrangers connaissaient généralement un avenir en Chine différent de celui anticipé.
Cette « désillusion » peut cependant être heureuse. Les tentes de camping Décathlon sont achetées par les seniors chinois pour se protéger du soleil lors de leurs pique-niques dans les parcs. Carrefour vend très tôt de grands crus, car l’enseigne d’hypermarchés est un gage de qualité, dans un marché où beaucoup de faux circulent. Lacoste vend plus cher en Chine qu’en Occident des produits fabriqués localement. H&M se positionne sur du premium.

EA : Quelles leçons en tirez-vous ?

Première leçon : votre identité chinoise ne sera pas votre identité occidentale. En plus de l’identité dont le marché chinois s’approprie lui-même les caractéristiques, il faut ajouter votre identité choisie en chinois, qui sera à construire – votre nom, votre ligne éditoriale, vos messages – ou qu’il faudra revoir. On pense notamment à Coca-Cola ou Hermès, qui ont su choisir d’excellents noms en chinois faisant directement écho à leurs produits ou à leurs origines.
Deuxième leçon : le modus operandi doit s’adapter aux pratiques locales. Lorsque deux entrepreneurs français ont créé le site de ventes privées Glamour-Sales en 2009 (dont la majorité des parts seraient vendues à Alibaba en 2015 pour plusieurs centaines de millions de yuans), le modèle économique dominant était le « zéro stock » et le « BFR négatif ». Mais les shoppeurs chinois n’étaient pas du genre à attendre un mois pour recevoir leurs commandes, dans un pays où l’on se faisait livrer son café dans l’heure. Les gérants ont donc dû stocker 1/3 de leurs ventes pour livrer rapidement et, par conséquent, brûler beaucoup plus de cash que leurs homologues français.
Troisième leçon : un succès à court-terme peut être plus dangereux qu’un démarrage prudent. Certaines marques ont même été rachetées par leurs fournisseurs chinois suite à leurs succès éphémères.
Dernière leçon : mettez à la tête de vos entreprises en Chine des innovateurs locaux, et non pas des duplicateurs du modèle occidental. Plus que jamais sur le marché chinois, les méthodologies itératives issues de la méthode californienne Lean sont essentielles.

 

Propos recueillis par Louis Armengaud Wurmser (E11), responsable des contenus ESSEC Alumni

 

C’est les vacances ! L’occasion de faire le bilan de l’année écoulée, et de se replonger dans les archives de Reflets ESSEC Magazine. Cet article a été initialement publié fin 2017, dans le n°121,  au sein du dossier « Chine : la tentation française » consacré aux diplômés de l’ESSEC qui s’expatrient – et réussissent – en Chine. Pour accéder à l’intégralité des contenus de Reflets ESSEC Magazine, cliquer ici.

 

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