Paul Melun (E20) et Jérémie Cornet (E20), co-auteurs : « Notre génération saute dans le vide »
Pas encore diplômés et déjà publiés ! Dans leur ouvrage Enfants de la déconstruction, Jérémie Cornet (E20) et Paul Melun (M20) dressent le portrait d’une génération – la leur – en perte de repères… mais prête à tout réinventer. Explications.
ESSEC Alumni : Comment en êtes-vous venus à écrire ce livre ?
Paul Melun : Notre identité, celle qui nous a poussé à écrire, se trouve dans les territoires et dans nos vies en Charente et en Gironde, dans nos engagements politiques, associatifs et artistiques, et bien sûr dans le plaisir que nous avons à débattre ensemble de longues heures durant.
Jérémie Cornet : Nous sommes également, comme certains jeunes de notre génération, des enfants des voyages. Nous avons passé plusieurs années dans des pays étrangers qui nous ont nourris d’enseignements. Ces expériences sont pour beaucoup dans l’écriture de ce livre.
EA : Qui désignez-vous exactement en parlant d’ « enfants de la déconstruction » ?
P. Melun : Nous pensons que les enfants de la déconstruction sont une tendance hégémonique en Occident, un nouveau modèle incarné par tous à des degrés très divers.
J. Cornet : La déconstruction, c’est la fin des grandes idéologies et avec elles leurs lots de repères, de cadres et de valeurs morales, l’héritage d’une « terre brûlée » par ses prédécesseurs. La génération qui ouvre sur le XXIème siècle a la particularité de vivre une forme de saut dans le vide que peu ont pu connaître auparavant.
EA : Quel serait le portrait-robot des enfants de la déconstruction ?
P. Melun : Certains d’entre eux, les plus « avancés », maîtrisent les nouvelles technologies, s’insèrent dans la mondialisation, refusent le temps long et ignorent le passé pour faire de l’instant présent le temple du rentable.
J. Cornet : Outre ces figures de proue, d’autres sont plus passifs devant ces changements et se contentent de suivre cette déconstruction par un mode de vie simple et imposé entre applications de rencontres et séries TV américaines.
EA : Pourquoi dites-vous que la jeunesse d’aujourd’hui est « en rupture » ?
P. Melun : Toute génération se construit différemment de la précédente mais, dans le cas présent, nous considérons que la rupture est plus importante, plus radicale, et se joue en un laps de temps très court, que le progrès, la mondialisation et le digital ont contribué à accélérer.
J. Cornet : La rupture est ici entre le passé et ses rigidités et le présent et sa libéralité. Or nous considérons que la liberté offerte par la déconstruction masque une réalité toute autre…
EA : La jeunesse que vous décrivez est-elle également celle qui intègre l’ESSEC aujourd’hui ?
J. Cornet : C’est une bonne question… De fait, la figure de proue des enfants de la déconstruction évolue dans les grands centres urbains, bénéficie de la mondialisation, et en ce sens cette jeunesse est représentée à l’ESSEC. Cependant nous ne voulons pas mettre les uns et les autres dans des cases. Beaucoup d’étudiants à l’ESSEC se caractérisent avant tout par leur singularité.
P. Melun : L’ESSEC se distingue en effet par sa tradition d’école ouverte et par la pluralité de son recrutement – nous en sommes la preuve ! Sur le campus, nous avons eu la chance d’échanger au quotidien avec des camarades politistes, ingénieurs, pharmaciens ou financiers. C’est précieux, car la compréhension de l’autre passe par la rencontre et le partage.
EA : Quelles pistes proposez-vous aux enfants de la déconstruction pour (se) reconstruire ?
P. Melun : Si nous livrons une vision parfois sombre de cette jeunesse et de ses perspectives, nous ne voulons pas que le choix de notre avenir ne se fasse qu’entre populisme identitaire et ultra-libéralisme. Nous proposons aussi des alternatives aux orientations prises par la société actuelle.
J. Cornet : La fin du livre traite largement de cette question et nous souhaitons justement « reconstruire » : votre terme est bien choisi. Nos propositions s’articulent autour de trois axes fondateurs selon nous pour préparer l’avenir : « La Terre », « La science » et « La culture ». Ces trois axes font selon nous la force et la grandeur de notre démocratie et peuvent servir de socle pour construire un avenir apaisé.
Propos recueillis par Louis Armengaud Wurmser (E10), responsable des contenus ESSEC Alumni
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Image : Jérémie Cornet (E20) et Paul Melun (M20)
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