Retour aux actualités
Article suivant
Article précédent

Reflets Mag #139 | Tony Estanguet (M07), président de Paris 2024 : « Des Jeux, engagés, spectaculaires et participatifs ! »

Interviews

-

21/07/2021

Triple champion du monde, triple champion d'Europe et neuf fois champion de France de canoë monoplace-C1 slalom, Tony Estanguet (M07) reste en outre le seul sportif français trois fois médaillé d'or lors de trois olympiades différentes. En couverture de Reflets Mag #139, l’athlète devenu patron de Paris 2024 explique qu’il veut des Jeux olympiques et paralympiques d'été sobres, inclusifs et exemplaires sur le plan environnemental, avec un nouveau modèle d'organisation pour marquer les esprits. On vous met l’article en accès libre… abonnez-vous pour lire le reste du numéro !

Reflets Magazine : À tout juste trois ans des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024, où en sont les préparatifs ?

 Tony Estanguet : Nous sommes dans les temps. Je veux rappeler que la particularité de Paris 2024 est que nous construisons très peu par rapport aux Jeux qui nous ont précédés, pour nous appuyer sur le patrimoine français. 95 % des infrastructures sont déjà existantes, et les quelques rares installations qui restent à construire sont déjà bien avancées. Je pense notamment au Grand Palais éphémère sur le Champ-de-Mars dont les travaux viennent tout juste de s'achever et qui accueillera les compétitions de judo et de lutte, au centre aquatique de La Plaine Saint-Denis, et au village olympique qui accueillera les athlètes à Saint-Denis. Il n'y a donc pas de retard, nous continuons à suivre le calendrier établi, aujourd'hui l'actualité est de préparer l'entrée dans notre propre olympiade. Nous avons passé les deux dernières années à poser les fondations, à établir une stratégie et la gouvernance générale de l'organisation. Nous sommes désormais dans une phase d’engagement de notre écosystème : on va donner plus de force au Club Paris 2024, aux territoires Terre de Jeux 2024, afin que les Français puissent se connecter à Paris 2024 dès cet été.

RM : La crise sanitaire n'a donc pas eu de réel impact sur votre organisation…

T. Estanguet : Au contraire, la pandémie a montré que notre projet avait plus que jamais du sens, que nous avons besoin du sport pour être en bonne santé, que nous avons besoin des événements sportifs pour partager des émotions collectives uniques. Accueillir le plus grand événement au monde va aussi permettre de mettre notre pays, nos entreprises et nos territoires en valeur, et de dresser un horizon positif pour l'ensemble de la population. On ressort de cette année si particulière avec une détermination décuplée, il nous faut donc continuer à être très ambitieux et à renforcer la place du sport dans la société. Les grands événements sportifs comme les Jeux sont un excellent moyen d'y arriver.

RM : Dans ce contexte très particulier, les Jeux de Tokyo pourraient-ils vous apporter des enseignements ?

T. Estanguet : C’est toujours très utile pour un comité d’organisation d’aller observer sur place le fonctionnement des Jeux : le transport, l’hébergement, la restauration, la sécurité, l’expérience spectateurs… À Tokyo, les organisateurs ont travaillé sur différentes solutions pour s'adapter au contexte sanitaire, avec la mise en place de tests, un système de bulles, et plus ou moins de public. Tout a été pensé pour que ces Jeux puissent se dérouler avec un très haut niveau de sécurité sanitaire. Par ailleurs, de nombreuses mesures de simplification ont été mises en place, dont nous pourrons nous inspirer. 

RM : Les Jeux de Paris 2024 seront-ils différents de ceux de Rio, Londres ou Pékin en matière d'organisation ?

T. Estanguet : Nous avons tenté de nous affranchir de ce qui avait pu se faire par le passé pour construire un modèle en phase avec notre temps. Nous souhaitons des Jeux spectaculaires, engagés en matière d'environnement et de mixité, et participatifs avec, pour la première fois dans l'histoire des Jeux, des épreuves ouvertes au grand public, comme le marathon, en marge des épreuves officielles. C’est très important pour nous que toute la population puisse s’en emparer, que chacun puisse vivre l’expérience olympique et paralympique. Ces Jeux sont également l’opportunité de mobiliser tous les acteurs qui peuvent contribuer à faire du sport un outil d’impact social à grande échelle, pour valoriser le rôle du sport face à tous les grands défis de notre société, que ce soit l’éducation, la santé, le vivre-ensemble, l’inclusion.

RM : En quoi ces Jeux seront-ils spectaculaires ?

T. Estanguet : Nous avons de la chance en France d’avoir un patrimoine d’exception, nous avons choisi de le mettre en lumière en choisissant des sites iconiques pour les compétitions, avec des épreuves au pied de la Tour Eiffel, au Grand Palais, aux Invalides, place de la Concorde, dans les jardins du château de Versailles. Nous sommes en train de réfléchir au concept des cérémonies d'ouverture et de clôture qui sont les deux temps forts des Jeux pour les télévisions du monde entier. L'idée serait de trouver une alternative au modèle classique dans un stade pour ouvrir les cérémonies au cœur de la ville, notamment sur les bords de Seine qui peuvent accueillir beaucoup de monde. On souhaite proposer une expérience unique aux quatre milliards de téléspectateurs à travers le monde en faisant dans le même temps la promotion du patrimoine architectural exceptionnel de la ville. L'enjeu est de repousser les limites tout en valorisant un modèle durable et responsable.

RM : Où en êtes-vous en termes de montée en puissance de l’organisation ?

T. Estanguet : Nous sommes aujourd'hui au tout début de l'aventure. À peine seulement 10 % des équipes ont été constituées, la montée en puissance va se faire progressivement jusqu'au début de 2024, ce n'est que dans les six derniers mois avant les Jeux que nous atteindrons notre pic, avec un comité d'organisation qui comptera autour de 4 000 personnes. Mais au-delà des équipes du comité d'organisation, nous allons passer des marchés pour 2,5 milliards d’euros. L'enjeu consiste à donner dès maintenant de la visibilité sur nos besoins – qu'il s'agisse du marketing, de l'événementiel, de la logistique, des transports, de la gestion des déchets – pour que toutes les entreprises qui le souhaitent puissent s’y préparer dès maintenant. Seulement 5 % des marchés ont déjà été passés, cela laisse encore beaucoup d’opportunités. Par exemple, en 2022, les marchés concerneront les équipements sportifs, les fournitures pour les infrastructures temporaires et la restauration. Une quinzaine de familles de métiers sont représentées au total, des centaines d'appels d'offres sont proposés à toutes les entreprises, quels que soient leur taille ou leur profil : TPE, PME, ETI et  structures de l'économie sociale et solidaire, toutes peuvent candidater.

RM : Comment les jeunes diplômés peuvent-ils participer à l'aventure ?

T. Estanguet : Nous recherchons des profils dans tous les secteurs : la communication, les relations internationales, l'urbanisme, les ressources humaines, le juridique, l'informatique, le commerce ou encore le marketing. Une soixantaine d'alternants vont d'ores et déjà être recrutés d'ici au mois de septembre, les recrutements vont aller crescendo. Paris 2024 doit être un acteur de la relance, notamment en direction des jeunes auxquels nous souhaitons offrir les meilleures conditions pour développer leurs compétences humaines et professionnelles, pour qu'ils se forment dans un environnement convivial tout en les accompagnant dans la suite de leur carrière. J’encourage tous les jeunes diplômés de l’ESSEC passionnés de sport et/ou qui ont envie de contribuer à un grand projet collectif à postuler en ligne sur l'espace recrutement du site Paris 2024.

RM : Qu'est-ce que vous aimeriez que l'on retienne des Jeux de 2024 ?

T. Estanguet : Que l'organisation de ces Jeux démontre que l'on vit dans un pays incroyable, un pays qui a tout pour réussir, un pays qui dispose d'une jeunesse engagée, compétente, qui peut réaliser des choses extraordinaires. J'aimerais aussi que l'on retienne que lorsqu'on travaille ensemble, on peut sans cesse repousser les limites en organisant un événement à la fois spectaculaire, durable et engagé, qui divise par deux les émissions carbones et qui a une contribution positive pour l’environnement, la parité et l'inclusion. J'espère que nous aurons réussi à renforcer la place du sport dans le quotidien des Français : à l'école, dans l’entreprise, dans l’espace public…

RM : Vous voulez dire que ces Jeux ne concernent pas le seul sport, c'est un ensemble ?

T. Estanguet : Je veux dire en effet qu'on ne parle pas seulement de deux fois quinze jours de compétition, nous avons une approche à 360°. L'enjeu est aussi d'impacter au niveau économique, au niveau sociétal, montrer tout ce que le sport peut apporter à notre société et susciter des vocations. Nous avons envie que ce projet soit le reflet d'une France qui rayonne, qui réussit, une France enthousiaste et optimiste pour l'avenir.

RM : Quelques questions sur l’ESSEC pour finir. Comment êtes-vous arrivé dans cette école ?

T. Estanguet : J’ai eu la chance d’assister aux Jeux de Barcelone, en 1992. J’avais 14 ans. À partir de ce moment-là, j’ai eu une seule obsession : revenir aux Jeux en tant qu’athlète. En parallèle, parce qu’on a la chance en France d’être poussé à mener de front carrière sportive et scolarité, j’ai obtenu un Bac S, puis suivi des études de STAPS à l'université de Toulouse. Après les Jeux d'Athènes, en 2004, j’ai voulu compléter ma formation avec un cursus tourné davantage vers le secteur privé, pour pouvoir couvrir toutes les facettes du monde du sport, du volet pratique sportive, santé, éducation, à l’aspect événementiel et business. L'ESSEC proposait alors un mastère spécialisé « Sport, Management et Stratégie d'entreprise ». C’était exactement ce qu’il me fallait. J’avais en tête de m’engager dans le domaine du sport, mais je recherchais une formation généraliste, ouverte sur d’autres horizons. 

RM : Quels souvenirs en gardez-vous ?

T. Estanguet : D'abord, celui d'avoir été extrêmement bien accueilli, d'avoir été mis dans d'excellentes conditions pour travailler, et d'avoir été formidablement accompagné. J'ai ensuite beaucoup apprécié de retrouver des valeurs qui se rapprochaient de ce que je connaissais dans la pratique du sport de haut niveau, à savoir la notion d'excellence incarnée par les professeurs et les intervenants que j'ai pu croiser, mais aussi des valeurs très humaines. Le développement personnel avait une place importante dans le cursus, on insistait beaucoup sur la notion d'identification de nos points forts qui permettraient d'atteindre nos objectifs. Le contenu pédagogique m'a permis de réfléchir à ce que je pourrais faire à l'avenir, et à ma capacité à pouvoir prendre des responsabilités. L'école m'a donc ouvert beaucoup d'horizons, j'en suis sorti bien dans mes baskets, et je pense que si aujourd'hui je suis à Paris 2024 à la tête d'un beau projet et d'une belle équipe, je le dois à la formation reçue à l'ESSEC.

RM : Un message à l'adresse des futurs diplômés ?

T. Estanguet : C'est un message d'enthousiasme. Quand on sort de l'ESSEC, le monde est à vous, vous avez tout pour réussir, il ne faut pas se mettre de limites, il faut voir grand, être ambitieux, aller de l'avant. Et faire du sport !

 

Propos recueillis par François de Guillebon, rédacteur en chef de Reflets ESSEC Magazine 

Paru dans Reflets Mag #139. Pour voir un aperçu du numéro, cliquer ici. Pour recevoir les prochains numéros, cliquer ici.

J'aime
3325 vues Visites
Partager sur

Commentaires0

Vous n'avez pas les droits pour lire ou ajouter un commentaire.

Articles suggérés

Interviews

Reflets Mag #154 | Nathalie Joffre (E05) : l’art et la mémoire

photo de profil d'un membre

Louis ARMENGAUD WURMSER

12 novembre

Interviews

Sandrine Decauze Larbre (E09) : « Rien ne prépare à faire face à 30 élèves »

photo de profil d'un membre

Louis ARMENGAUD WURMSER

12 novembre

Interviews

Mai Hua (E99) : « Mes docu-poèmes touchent à l'universel en explorant l'intime »

photo de profil d'un membre

Louis ARMENGAUD WURMSER

12 novembre