Reflets Mag #146 | Travail hybride : évolution ou révolution des espaces de travail ?
Dans Reflets Mag #146, Marie-Anne Morin (E04), fondatrice de Reaas Expertise et spécialiste de l’immobilier flexible et serviciel, fait le point sur le terme « hybrid working », qui fait couler beaucoup d’encre depuis son entrée dans le très estimé Oxford English Dictionary il y a tout juste un an. Découvrez l’article en accès libre… et pour lire les prochains numéros, abonnez-vous !
Le travail hybride est cette faculté de travailler ou d’étudier aussi bien depuis chez soi que depuis un tiers-lieu (coworking, centre d’affaires, hôtel, café…) ou au siège de l’entreprise.
Cette transformation puise ses racines dans la révolution numérique initiée dans les années 1970. Le bureau n’est plus un lieu. Nous n’allons plus « au bureau » tous les matins. Nous travaillons. Notre lieu de travail est aujourd’hui un espace numérique, avec des documents stockés dans un cloud, accessibles sur l’ensemble de nos outils (tablette, ordinateur, téléphone) et partagés avec nos collègues, clients et partenaires, partout sur la planète.
Dans ces conditions, pourquoi se lever tôt, passer des heures dans les transports, polluer, perdre du temps et de l’argent, pour arriver au bureau avec nos outils portables et en repartir le soir de la même façon ? Cela n’a de sens que dans l’interaction, le besoin de rencontrer les personnes avec lesquelles nous travaillons.
L’évolution est rapide. En 2020, Forbes indiquait que 72 % des entreprises n’avaient pas de stratégie claire en matière de travail hybride.
Quelques mois et deux confinements plus tard, en avril 2021, 63 %1 des entreprises avaient mis en place un modèle de travail hybride, plus écologique, plus flexible et plus productif. En répondant à leurs besoins, à leurs attentes, il permet aux salariés d’être plus concentrés et plus efficaces. En effet, 87 % des travailleurs2 indiquent préférer ce mode de travail hybride.
Qu’est-ce qu’une politique de travail hybride ?
C’est une approche managériale centrée sur le collaborateur, qui vise à augmenter la productivité et la satisfaction des salariés, en répondant aux plus grands challenges du travail à distance : le sentiment d’isolement et le manque d’appartenance à une communauté.
Le travail hybride apporte aux salariés une plus grande flexibilité et la possibilité de travailler depuis leur domicile ou n’importe quel autre lieu. Chacun choisit son lieu de travail en fonction des tâches qu’il aura à accomplir dans la journée (administratif / réunion / rendez-vous…).
Pour l’entreprise, deux choix majeurs doivent être réfléchis en matière de travail hybride.
Le modèle hybride : fixe ou flexible
Dans le cadre d’un modèle flexible, les collaborateurs choisissent leur lieu et leurs horaires de travail selon leur emploi du temps de la journée : s’ils doivent passer du temps, concentrés, sur un projet, ils choisiront peut-être de travailler de la maison, ou depuis un espace de coworking proche de chez eux. S’ils souhaitent travailler en équipe, rencontrer leurs collègues, participer à une formation, ils viendront au bureau.
Ce modèle, basé sur la confiance, apporte une flexibilité totale aux salariés et permet d’économiser sur les coûts immobiliers et les coûts de transport. Il peut cependant être difficile de trouver des jours qui conviennent à tous pour se réunir, et la gestion des flux et des postes disponibles au bureau est complexe.
Dans une configuration fixe, en revanche, c’est l’entreprise qui détermine les jours et les heures durant lesquels les salariés doivent être présents au bureau ou travailler à distance. Par exemple, une équipe sera présente au bureau les lundis et mercredis, une autre les mardis et jeudis.
Ceci est plus favorable au travail en équipe tout en permettant aux collaborateurs de limiter leur temps de trajet sur des jours déterminés. Il est beaucoup plus facile d’organiser l’occupation des bureaux. En revanche, ce manque de flexibilité peut induire une baisse de productivité si l’agenda de la semaine n’est pas aligné avec les jours de présence.
Modèle hybride : priorité au bureau ou au travail a distance ?
Dans le premier cas, les collaborateurs sont tenus d’être présents au bureau, mais ont la flexibilité de choisir quelques jours pour travailler de l’extérieur, chez eux ou dans un tiers-lieu. Ceci permet de laisser à chacun le choix de ses jours, tout en maintenant une forte culture d’entreprise. Il est cependant indispensable d’utiliser les bons outils, faute de quoi il est impossible pour un salarié de savoir si les personnes avec qui il souhaite travailler seront présentes les mêmes jours que lui. La question se pose également pour la gestion des effectifs au sein de l’entreprise.
Dans le second cas, les salariés travaillent à distance la plupart du temps et se réunissent dans des espaces de coworking ou au siège pour des réunions et des formations. Dans cette configuration, poussée à l’extrême, l’entreprise ne dispose pas de bureaux fixes.
Le premier avantage est financier car la charge immobilière de l’entreprise est réduite drastiquement. En revanche, si cela augmente la productivité et la satisfaction des personnes qui souhaitent travailler principalement à distance, le risque est bien réel d’avoir des salariés qui se sentent isolés et perdent totalement la notion de culture d’entreprise.
Quels bénéfices à la mise en place du travail hybride ?
Le travail hybride se veut plus écologique, plus productif et plus flexible, et vise à rendre les salariés heureux dans leur équilibre entre vie privée et vie professionnelle.
Depuis la pandémie de Covid-19, il a été admis que des millions de personnes n’avaient plus de nécessité à effectuer chaque jour ces déplacements pendulaires. De plus en plus de salariés travaillent donc une partie du temps de la maison ou d’un tiers-lieu proche de leur domicile. Aujourd’hui, 77 % des employés déclarent que la proximité du lieu de travail avec leur domicile sera un élément déterminant dans leur prochaine recherche d’emploi2.
Les entreprises aussi bénéficient de ce changement. Elles n’ont plus de raison d’aligner des dizaines de bureaux dans les quartiers d’affaires les plus chers. Elles doivent repenser leurs espaces, dans un esprit de collaboration, de réunion, avec des « points de chute » proches des lieux d’habitation de leurs collaborateurs.
Pour les collectivités, c’est l’occasion de (re)dynamiser des quartiers entiers, d’y apporter des services. Cela permet aux consommateurs locaux de rester près de chez eux pour leurs courses et leurs loisirs. Par exemple en utilisant des salles de sport proches de leurs lieux de vie, et non plus centralisées autour des bureaux.
Le bureau n’est pas appelé à disparaître, mais bien à se transformer en profondeur pour mieux s’adapter aux nouvelles attentes des travailleurs.
1 Accenture Future of Work Study, avril 2021
2 PwC Remote Working Study, janvier 2021
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Image : © AdobeStock
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