Revivez le discours de Stéphanie Rivoal (E93) au Gala ESSEC
Stéphanie Rivoal (E93), secrétaire générale du Sommet Afrique-France 2020, a pris la parole devant les étudiants et les diplômés lors du Gala ESSEC 2019 au Palais Brongniart à Paris, dans un discours enthousiasmant, largement inspiré de son parcours (qu’elle nous racontait ici). Morceaux choisis.
« Aujourd’hui, je vous retrouve, étudiants, alumni de toutes promos, et je dois dire que je n’ai pas vu le temps passer. J’ai vécu des expériences, des aventures, j’ai fait des rencontres humaines d’une diversité incroyable et si je devais mourir demain, je n’aurais aucun regret. »
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« Je ne regrette pas d’avoir entamé mon chemin professionnel chez Goldman Sachs à Londres. Pourtant j’ai été licenciée après moins de deux ans et j’ai été profondément blessée, vexée, humiliée par cet épisode de ma vie. Il y a des moments, des jours, des minutes sur lesquelles vous pouvez poser le doigt et vous dire : « À cet instant, ma vie a basculée. Si cette minute n’avait pas eu lieu, je ne serais pas qui je suis aujourd’hui ». Ce licenciement fait partie de ces moments-là, un moment clé, douloureux, salutaire, une révélation. Comme le disait Nelson Mandela : 'I never lose, I either win or learn'. »
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« Pour la première fois de ma vie, j’ai réfléchi à ce que je voulais en faire. J’ai réalisé par cette expérience violente et brutale ce qui allait être important pour moi. Ma liberté de choix. J’ai ravalé ma fierté, j’y suis retournée mais tellement plus forte, tellement plus au clair avec moi-même que plus rien n’allait m’arrêter sur ce nouveau chemin, celui que j’avais choisi de me tracer, seule, loin des influences et des pollutions du monde, des autres, de leur projection sur moi, leurs idées, leurs convictions qui n’étaient pas les miennes. J’ai appris aussi que je pouvais survivre à la honte, qu’elle était sociale mais pas personnelle et que cet épisode remettait en cause mon poste mais pas mon identité. »
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« Je pourrais dire que j’ai eu de la chance mais ce serait laisser penser que les choses sont arrivées toute seules. Cela n’a jamais été le cas pour moi. Je suis toujours allé chercher l’aventure d’après. J’ai demandé à mes chefs successifs dans la banque d’affaires de me donner plus de responsabilités, parfois des prétentions que je pensais moi-même au-dessus de mes possibilités. J’ai eu de l’audace, d’aucun dirait de la prétention. J’ai appris et j’ai grandi. »
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« Des aventures, j’en ai vécues beaucoup. J’ai eu chaud au Darfour, froid en Sibérie. Je me suis assise des dizaines de fois sous l’arbre à palabres avec des chefs de villages, des commanders rebelles, des villageois du bout du monde. J’ai des dizaines d’anecdotes plus improbables les unes que les autres à raconter. J’ai vu les yeux émerveillés des enfants soudanais d’un camp de réfugiés devant le film « Oceans ». Ils n’avaient jamais vu autant d’eau et m’ont demandé si tous ces poissons se mangeaient. »
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« L’humanitaire, ce n’est pas ce que l’on croit. Ce n’est pas exaltant et romantique, c’est dur et frustrant. Mais ce que l’on fait, ce que l’on vit, importe. On reçoit mille fois plus que ce l’on donne. Après avoir parcouru le monde, vu de près l’horreur mais aussi la splendeur de l’humanité, j’ai choisi de représenter mon pays à l’étranger. Encore une fois, personne n’est venu me chercher pour devenir diplomate. J’ai demandé, c’était étonnant, inhabituel mais vous voyez, ça a marché. Je me suis sentie souvent illégitime dans mes démarches. J’ai parfois douté. Je l’ai caché, j’ai pris un air sûr de moi car les autres n’aiment pas les gens qui doutent. Je ne me suis à ce jour jamais déçue. Je suis loin d’avoir tout réussi mais j’ai tout tenté. »
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« Ce soir, on m’a demandé d’inspirer. J’ai envie de dire que nous devons tous inspirer autour de nous, rayonner de bienveillance, transmettre de l’énergie positive, proposer des solutions et les mettre en œuvre. Il y va de notre planète, de notre société solidaire et fraternelle, de notre liberté et de ce qui nous définit le plus profondément possible, nos valeurs. L’humanisme, les valeurs républicaines, la liberté, les droits humains, l’égalité, la dignité et ce qu’on met parfois de côté, la fraternité. J’ai prononcé souvent ces mots en tant qu’ambassadrice à la fin de mes discours. Et plus on est loin de la France, plus ils prennent tout leur sens. Ces fondamentaux n’existent pas parfois. Il est nécessaire de les défendre, pour nous et pour les autres. Surtout pour les autres. »
Illustration : © Noir sur Blanc
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