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Reflets Mag #140 | Stéphanie Rivoal (E93) : « La ville de demain se fabrique en Afrique »

Interviews

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23/11/2021

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Confrontée à une urbanisation sans équivalent dans le monde, l’Afrique saura-t-elle éviter le désastre environnemental – voire proposer des solutions inspirantes pour les villes du monde entier ? Stéphanie Rivoal (E93) dresse un état des lieux dans le dossier « Ville de demain, ville durable ? » de Reflets Mag #140. On vous met l’article en accès libre… abonnez-vous pour lire le reste du numéro !

Reflets Magazine : Comment avez-vous été amenée à travailler sur le sujet des villes durables en Afrique ? 

Stéphanie Rivoal : J’ai été nommée Secrétaire Générale du Sommet Afrique-France 2020, pour lequel j’ai rencontré de nombreux acteurs locaux : ministres, maires, associations de quartiers, de femmes, de jeunes, ou encore entreprises travaillant dans le logement, la mobilité, l’énergie, l’eau, les déchets. L’événement, malheureusement annulé pour cause de pandémie, s’inscrivait dans la continuité du discours d’Emmanuel Macron à Ouagadougou : « 500 millions d’urbains en plus sur le continent en 2025, personne n’a jamais relevé un tel défi. Ce sera votre défi, le nôtre. Cela peut être une chance et cela peut être une catastrophe. Pour ma part, j’ai la conviction que c’est en Afrique qui est en train d’être inventée la ville durable de demain. »

RM : Les villes africaines font-elles face à des enjeux environnementaux spécifiques ? 

S. Rivoal : Les enjeux sont les mêmes qu’ailleurs, mais puissance 10, car les villes africaines grandissent à un rythme effréné – Le Caire, Kinshasa ou encore Lagos formeront bientôt des mégalopoles de dizaines de millions d’habitants – face auquel les pouvoirs locaux s’avèrent souvent démunis. Les agglomérations s’étalent donc de manière erratique et exponentielle, sans réelle planification urbaine, au prix d’une déforestation et d’une artificialisation des sols accélérées, et d’embouteillages terriblement polluants, les insuffisances des réseaux électriques et le déficit d’infrastructures empêchant le développement des mobilités douces.

RM : Quelles réponses les villes africaines peuvent-elles apporter à cette situation ? 

S. Rivoal : Les villes africaines ont l’avantage d’être récentes : elles n’ont pas de transition à opérer contrairement aux villes européennes avec leur bâti majoritairement ancien, elles peuvent donc intégrer directement la durabilité à leurs constructions – privilégier les alternatives au béton, recycler les eaux usées pour l’irrigation des jardins, diversifier les affectations des quartiers (logements, bureaux) afin de limiter les mouvements de population… 

RM : Gagnerait-on à s’inspirer de certaines initiatives africaines existantes ?

S. Rivoal : Malgré le fléau des décharges à ciel ouvert et de la pollution plastique, l’Afrique a de quoi nous apprendre sur la gestion des déchets, qui sont souvent triés sur leur lieu de production pour faire vivre des familles entières, plutôt que d’être collectés et transférés vers un site d’incinération – la majorité des habitants vivant dans des conditions économiques difficiles, aucune possibilité de valorisation n’est perdue. Les habitats économes en énergie se développent également et peuvent nous donner des idées pour atteindre la frugalité à laquelle nous aspirons sous nos latitudes. Autre modèle intéressant, qui aurait du sens dans certaines petites villes européennes : l’Agora WinWin, complexe rassemblant espace de sport, salle de concert, amphithéâtre, crèche, bureaux partagés et dispensaire, réalisés à partir de containers à petits prix avec toit solaire.

RM : Quid des bidonvilles africains ?

S. Rivoal : Je vais vous dire quelque chose de contre-intuitif : les bidonvilles constituent les sites urbains les plus durables. Ils émettent peu de CO2, tout y est recyclé… Mais ce qui est durable au sens strict n’est évidemment pas digne et vivable pour les habitants. Des solutions intelligentes de réhabilitation, sans expulsions, sont nécessaires – et possibles, notamment en adoptant une approche communautaire comme le tente l’Afrique du Sud.

RM : Quel avenir voyez-vous pour les villes africaines ? 

S. Rivoal : Je vois un même besoin que partout ailleurs : celui de créer un continuum de villes, villes de différentes tailles afin d’habiter les territoires de manière équilibrée. Le regain d’intérêt pour les villes de taille intermédiaire me paraît un bénéfice collatéral de la pandémie, car ce mouvement, s’il se confirme, peut laisser le temps de trouver des solutions adaptées sans avoir à gérer une urbanisation sauvage. En tous les cas, le sujet des villes durables suscite un enthousiasme sincère dans le monde entier, chez les citoyens comme chez les politiques. Le changement est à portée de main !

 

Propos recueillis par Louis Armengaud Wurmser (E10), responsable des contenus ESSEC Alumni 

Extrait du dossier « Ville de demain, ville durable ? » de Reflets Mag #140. Pour voir un preview, cliquer ici Pour recevoir les prochains numéros, cliquer ici.

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