Retour aux actualités
Article suivant
Article précédent

Delphine Darmon (E96) : « Tous les métiers peuvent être engagés »

Interviews

-

15/04/2024

Delphine Darmon (E96) publie Les Inspirants aux Éditions de l’Aube, recueil dans lequel elle rassemble et retranscrit une série d’entretiens réalisés dans le cadre de son podcast Demain n’attend pas avec des personnes qui mobilisent leurs compétences professionnelles pour s’engager. Rencontre.

ESSEC Alumni : Comment votre parcours vous a-t-il menée à publier Les Inspirants 

Delphine Darmon : Après une première carrière dans la grande distribution (Fnac et Franprix), j’ai lancé aux États-Unis une boisson produite selon les principes du commerce équitable qui m’a amenée sur les routes de Casamance, au Sénégal, à la rencontre des femmes en charge de la récolte de nos fruits. Ce voyage a bouleversé ma vision de la responsabilité des entreprises tout au long de leur chaîne de valeur. De retour en France, j’ai orienté mes activités autour de deux axes liés à cette prise de conscience : d’une part, l’accompagnement des entreprises dans la transformation de leur modèle d’affaire pour respecter les limites planétaires ; d’autre part, la mise en avant de femmes et d’hommes qui inventent et construisent le monde de demain, dans l’idée d’inspirer d’autres engagements. C’est ainsi qu’est né mon podcast Demain n’attend pas, avec un nouvel épisode toutes les deux semaines, qui a lui-même nourri mon livre, Les Inspirants.

EA : Que contient cet ouvrage ? 

D. Darmon : Les Inspirants reprend 11 épisodes du podcast Demain n’attend pas – soit 11 invités qui exercent un métier plus ou moins « ordinaire » (juriste, infirmier, gynécologue, neuropsychiatre, entrepreneur, directeur général, mais aussi chef cuisinier, photographe, réalisateur, artiste, aventurier) et qui mobilisent leurs compétences professionnelles pour s’engager dans des causes importantes, à une grande échelle.

EA : Plus précisément, qui sont les invités auxquels vous donnez la parole ?

D. Darmon : J’ai l’immense joie de rassembler dans ce livre les interviews de JR, artiste ; Reza, photographe de guerre ; Boris Cyrulnik, neuropsychiatre ; Pascal Demurger, directeur général de la MAIF et coprésident du Mouvement Impact France ; Jean-Louis Etienne, explorateur à l’initiative de l’expédition PolarPods ; Mauro Colagreco, chef cuisinier, propriétaire du Mirazur ; Ghada Hatem, gynécologue et fondatrice de la Maison des Femmes ; Flore Vasseur, réalisatrice du documentaire Bigger Than Us ; Nicolas Chabanne, fondateur de la marque C’est Qui Le Patron ?! ; Abdelaali El Badaoui, infirmier et fondateur de Banlieues Santé ; et Marine Calmet, juriste des Droits de la Nature et fondatrice de WildLegal. 

EA : Pourquoi avoir sélectionné ces profils parmi tous ceux passés par votre podcast ? 

D. Darmon : J’ai sélectionné des hommes et des femmes qui ont observé des dysfonctionnements dans leur métier, qu’ils ont progressivement jugés inacceptables. Et qui s’y sont attaqués avec leurs compétences professionnelles. C’est un message auquel je tiens particulièrement. On a tendance à penser qu’il faut attendre un déclic pour s’engager. Ou qu’il faut être né Greta Thumberg, le poing levé. Avec ce livre, je veux montrer que tous les métiers peuvent être engagés, que chacun peut impacter positivement le monde à travers son travail quotidien, sans forcément faire de l’activisme ou de la politique. 

EA : Quels compléments cet ouvrage apporte-t-il aux retranscriptions des épisodes sélectionnés ?

D. Darmon : Chaque épisode est suivi de quelques pages qui reprennent de façon synthétique les enjeux traités par l’invité, avec notamment les chiffres clés à retenir, ainsi que des suggestions de lectures, films, podcasts ou associations pour celles et ceux qui voudraient approfondir. Par ailleurs, l’échange avec l’artiste JR figure en exclusivité dans le livre.

EA : Quel épisode vous a-t-il le plus marquée ? 

D. Darmon : Il y en a tant… Si je dois choisir, je parlerai de la rencontre avec Ghada Hatem. J’ai été impressionnée par l’efficacité et l’originalité de l’approche qu’elle a développée avec la Maison des Femmes, une forme d’accompagnement pragmatique et holistique, qui évolue dans le temps, et qui permet de transformer la vie des femmes victimes de violences physiques et d’emprise psychologique. Une partie des revenus du livre sera d’ailleurs reversée à cette association. 

EA : En définitive, quels principaux messages retenez-vous des épisodes mis en avant dans votre ouvrage ? 

D. Darmon : Chacun de mes invités passe à l’action non seulement parce qu’il ou elle ne croit pas que le fonctionnement de la société soit immuable, ce qui lui donne l’énergie, l’endurance et la détermination nécessaires pour porter le changement – mais aussi parce qu’il ou elle accepte de s’entourer et de partager le pouvoir. Ce mélange de positionnement individuel et de mobilisation collective, assez proche au fond de ce que réclame l’entrepreneuriat, me paraît la clé de leur capacité de transformation. Voilà pour l’amont. En aval, je retiens que tous et toutes y gagnent le sentiment d’alignement, l’appartenance à une communauté, une grande joie, un optimisme… Autant de raisons qui incitent à suivre leur exemple. 

EA : À la lumière des témoignages que vous avez récoltés, quels conseils pratiques donneriez-vous aux ESSEC désireux de s’engager dans le cadre de leurs activités professionnelles ? 

D. Darmon : Avant toute chose, ne vous autocensurez pas : vu les enjeux colossaux auxquels nous faisons face, nous avons besoin que chacun et chacune agisse sur sa propre zone d’influence. Ensuite, je conseille à tout le monde de se poser les questions suivantes : mon entreprise a-t-elle une véritable utilité sociale ? Répond-elle à un besoin réel des citoyens (nous nourrir, nous loger, nous soigner, nous éduquer…) ? Si c’est le cas, quelles sont les conséquences sociales et environnementales de sa production ou de son service ? Si ces conséquences sont problématiques, a-t-elle une volonté de retravailler son modèle pour réduire ses externalités négatives ? Si oui, pouvez-vous participer à cette mutation ? Si non, il est probablement temps de partir et de mettre votre temps, votre intelligence et vos talents au service d’une activité plus utile pour le monde. 

 

Propos recueillis par Louis Armengaud Wurmser (E10), responsable des contenus ESSEC Alumni 

Vous avez aimé cet article ? Pour que nous puissions continuer à vous proposer des contenus sur les ESSEC et leurs actualités, cotisez à ESSEC Alumni.

J'aime
1146 vues Visites
Partager sur

Commentaires0

Vous n'avez pas les droits pour lire ou ajouter un commentaire.

Articles suggérés

Interviews

Oriane Sarrouy (E23) : « L’élection américaine n’empêchera pas la croissance de la cleantech »

photo de profil d'un membre

Louis ARMENGAUD WURMSER

17 juillet

Interviews

Paul Marty (E00) : « La crise énergétique est derrière nous, la transition devant »

photo de profil d'un membre

Louis ARMENGAUD WURMSER

02 juillet

Interviews

Esther Crauser-Delbourg (E09) : « Il faut résoudre le problème de l’eau avant celui du CO2 »

photo de profil d'un membre

Louis ARMENGAUD WURMSER

29 mai