Retour aux actualités
Article suivant
Article précédent

Reflets Mag #152 | Tina Robiolle (E00) : une femme de paix

Interviews

-

30/04/2024

Dans Reflets #152, Tina Robiolle (E00) raconte son parcours dans les coulisses de l’industrie musicale comme dans les zones de conflit à l’international, en passant par les télécoms et la négociation. Mais son cœur de métier depuis toujours, c’est l’éducation. Découvrez l’article en accès libre… et pour lire les prochains numéros, abonnez-vous !

Dès son entretien pour intégrer l’ESSEC, Tina Robiolle explique au jury qu’elle se destine au secteur « non-profit » et aux relations internationales. « Un choix atypique à l’époque, qui m’a démarquée. »

Elle s’investit donc dans l’association ESSEC Partenariat Humanitaire (EPH), qui collecte des fonds et des livres pour les écoles de pays d’Afrique. Mais elle cofonde aussi une association consacrée à son autre passion, la promotion de la musique. Par ce biais, elle collabore avec plusieurs maisons de disques, dont Sony – qui lui procure un débouché imprévu.

« Ils m’ont proposé un stage en marketing… puis un CDI alors que je n’avais pas fini mon cursus. » Elle négocie une année de césure en CDD. « Je m’occupais du lancement d’artistes internationaux sur le marché français. Je me suis retrouvée à travailler avec des stars comme Shakira, Chayanne ou Mariah Carey. Tout en continuant à lire Le Monde diplomatique... »

Deux salles, deux ambiances

Car Tina Robiolle ne perd pas de vue ses ambitions initiales. De retour à l’école, elle effectue un monitorat pour ESSEC IRENÉ (Institut de recherche et d'enseignement sur la négociation), alors récemment créé. « La négociation constitue un outil puissant pour la gestion de conflit et les relations internationales. Il était logique que je m’y intéresse. » Elle effectue d’abord des missions de business development pour la structure – puis elle est invitée à co-animer des cours pour les Mastères de l’ESSEC et l’ENA. « J’ai appris sur le tas. »

Elle souhaite cependant compléter la théorie avec la pratique et postule dans cette optique au programme « Télécom Talents », tout juste lancé chez France Télécom. Un parcours pour hauts potentiels qui lui donne immédiatement accès à de hautes responsabilités. « Pour mon premier poste, j’ai été nommée directrice de boutique à la tête d’une quinzaine de personnes. » Elle bascule dans le concret. « Par exemple, comment gérer un client insatisfait ? Avec l’équipe, nous avions établi un processus : identifier d’abord son niveau de colère ; passé un certain seuil, mobiliser un premier interlocuteur qui cristallisait son agressivité, puis un second qui lui faisait des propositions. »

Hautes tensions

Certes, le retail semble très éloigné du « non-profit ». « Mais je crois beaucoup aux compétences transférables d’un secteur à un autre. » Tina Robiolle le vérifie en continuant d’exercer en parallèle pour IRENÉ. « Pendant mes congés, je conduisais des séminaires de négociation dans des grandes écoles ou je facilitais des séminaires au Burundi et en RDC, en partenariat avec l’ONU. Au Burundi, il s’agissait de regrouper des personnes qui venaient de passer une décennie à se combattre et de leur enseigner les techniques de la négociation, à la fois pour qu’elles apprennent à traiter leurs oppositions autrement que par les armes, mais aussi pour qu'elles posent les bases d’une relation de travail, découvrent les humains derrière les positions et parviennent à collaborer pour trouver des solutions durables. » Elle en garde un souvenir marquant. « Une fois, un homme m’a demandé si nous étions des magiciens : l’un des participants avait commandité l’assassinat de sa femme sous ses yeux et pourtant, grâce à nous, ils arrivaient désormais à parler et même à se mettre d’accord. »

De l’Afrique à l’Afghanistan

Au bout de quelques années, Tina Robiolle quitte France Télécom pour s’installer aux États-Unis et se consacrer à ses activités de consultante indépendante auprès d’organisations internationales et non-gouvernementales. Elle se spécialise dans les enjeux liés à la relation entre éducation et conflits grâce à un doctorat obtenu à la Fletcher School à Boston. Éducation à la paix avec l’UNESCO, évaluation de missions de médiation du Centre HD pour le dialogue humanitaire en Libye et en Syrie, facilitation d’un plan de stabilisation de la région du lac Tchad pour le Programme des Nations unies pour le développement au Nigeria… Les missions se suivent et ne se ressemblent pas. L’une d’entre elles occupe cependant une place particulière.

« De 2009 à 2019, j’ai porté l’Afghan Women Leaders Initiative avec ma mère Fahimeh sous l’impulsion du prix Nobel de la paix Shirin Ebadi, rencontrée lors d’un événement à l’ESSEC auquel nous l’avions invitée en 2006. Les femmes afghanes commençaient alors à occuper une plus grande place au niveau politique. Cependant, il leur manquait des outils pour exercer leurs responsabilités. Avec le soutien de l’ESSEC, nous avons développé des formations en persan pour accompagner notamment des députées ainsi que la première femme candidate à la vice-présidence de l’Afghanistan, ou encore les trois seules femmes à avoir pris part au processus de négociation avec les Talibans en 2019. »

La classe internationale

Si le parcours de Tina Robiolle lui ouvre toutes sortes d’horizons, il n’en suit pas moins un fil conducteur : celui de l’enseignement. Et c’est ce fil qu’elle tire à nouveau quand elle rentre en France. « J’ai d’abord pris la direction pédagogique du Master in Human Rights and Humanitarian Action à Sciences Po PSIA. Puis l’ESSEC m’a offert le poste de directrice des études pour la Grande École et les Masters, que je suis heureuse d’occuper aujourd’hui. C’est une nouvelle opportunité de rendre à l’école ce qu’elle m’a offert à l’origine. »

Un retour à la maison-mère – même si elle n’en est jamais totalement partie. « Je suis restée impliquée en donnant régulièrement des cours de négociation, en participant aux jurys d’admission, en animant le Chapter San Francisco d’ESSEC Alumni, en bénéficiant du programme de mentorat EWA Boost’ par ESSEC Women Alumni et en rejoignant le conseil d’administration d’ESSEC Alumni, où je siège toujours. »

Avec ses fonctions académiques, elle boucle la boucle. « Au fond, ma carrière illustre ce que permet le modèle pédagogique de l’ESSEC – la souplesse et la flexibilité de la Grande École, la réelle individualisation du cursus. Cette responsabilisation de l’étudiant l’incite à réfléchir en dehors des silos, à ne pas forcément suivre un chemin tout tracé, à assumer ses choix comme à accepter les imprévus et à s’en saisir comme d’opportunités. Je n’aurais pas eu le même parcours en passant par une autre école. Et je ne regrette aucun de mes détours. »

 

Propos recueillis par Louis Armengaud Wurmser (E10), responsable des contenus ESSEC Alumni 

Paru dans Reflets Mag #152. Lire un aperçu du numéro. Recevoir les prochains numéros

J'aime
1090 vues Visites
Partager sur

Commentaires0

Vous n'avez pas les droits pour lire ou ajouter un commentaire.

Articles suggérés

Interviews

Reflets Mag #154 | Nathalie Joffre (E05) : l’art et la mémoire

photo de profil d'un membre

Louis ARMENGAUD WURMSER

12 novembre

Interviews

Sandrine Decauze Larbre (E09) : « Rien ne prépare à faire face à 30 élèves »

photo de profil d'un membre

Louis ARMENGAUD WURMSER

12 novembre

Interviews

Mai Hua (E99) : « Mes docu-poèmes touchent à l'universel en explorant l'intime »

photo de profil d'un membre

Louis ARMENGAUD WURMSER

12 novembre