Robert Ophèle (E78), président de l’AMF, en visite à l’ESSEC
Dans le cadre de son cycle consacré aux régulateurs financiers, le Centre d’Excellence Marchés des Capitaux et Régulation a invité Robert Ophèle (E78), président de l’Autorité des Marchés Financiers (AMF), pour une conférence-débat sur la finance européenne face au Brexit. Compte-rendu.
À l’heure du Brexit, Robert Ophèle a mis en perspective les enjeux liés à la potentielle perte du passeport financier européen pour le Royaume Uni et à la possibilité que celui-ci soit désormais considéré comme un pays tiers vis-à-vis de l’Union Européenne.
Le passeport financier donne le droit à toute entreprise de l’Union Européenne (UE) d’établir une branche ou de vendre des services financiers dans les 28 pays membres de l’Espace Économique Européen. Ainsi, un cinquième du chiffre d’affaires du secteur bancaire britannique reposerait aujourd’hui sur le droit de passeport, selon un rapport d’Oliver Wyman. Un pays qui quitte l’Espace Economique Européen (EEE) perd automatiquement le le bénéfice de ce passeport.
Une alternative au passeport est la possibilité de bénéficier de régimes dits d’équivalence. Ceux-ci permettent aux pays tiers dont le droit applicable est considéré par la Commission européenne comme aussi strict que celui en vigueur dans l’EEE, ou « équivalent », de proposer librement leurs services financiers dans l'UE. Toutefois la décision d’attribuer cette équivalence revient à la seule Commission, qui détient une marge de manœuvre significative pour déterminer les modalités de délivrance, mais aussi de retrait, ainsi que la durée et les conditions de l’équivalence. En outre, les régimes d’équivalence ne couvrent pas toutes les activités financières – notamment celle de gestion de fonds des particuliers (UCITS). Notons en outre que les régimes d’équivalence actuels pourraient être redéfinis, étant donné qu’avec le Brexit, c’est le marché financier le plus important de l’UE qui la quitte.
Toutefois, l’absence de supervision unifiée des marchés des capitaux constitue un handicap pour l’UE (chaque régulateur national est en charge de transposer les directives européennes, ce qui peut mener à des arbitrages réglementaires), et pourrait s’avérer préjudiciable dans le cadre du Brexit. Robert Ophèle se dit donc favorable au renforcement des pouvoirs de l’ESMA (European Securities and Market Authority), le régulateur européen des marchés de capitaux, créé en 2011 dans un environnement post-crise financière. Selon lui, l’ESMA ne devrait pas se contenter de superviser les agences de notations ou les registres centraux de données ; l’instance devrait aussi s’impliquer dans les décisions de régimes d’équivalence, prendre en charge la surveillance de l’équivalence (c’est-à-dire veiller à ce que le droit des pays tiers n’évolue pas de telle manière que l’équivalence puisse être remise en cause) et superviser les établissements les plus importants des pays tiers opérant dans l’UE, en coopération avec le superviseur du pays tiers.
Robert Ophèle rejoint la Banque de France en 1981. Après un détachement auprès de la Federal Reserve Bank de New York, il prend la Direction du Budget et du Contrôle de Gestion, puis est nommé Directeur Général Adjoint Économie et Relations Internationales, avant d'être promu Directeur Général des Opérations. À partir de 2012, il occupe le poste de sous-gouverneur de la Banque de France. À ce titre, il intègre le Conseil de surveillance de la Banque Centrale Européenne. Il est nommé Président de l'Autorité des marchés financiers en 2017.
Illustration : Robert Ophèle (E78)
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